La qualité d’un vin n’est pas un événement fortuit, tout le monde le sait. Il ne suffit pas non plus de posséder un vignoble dans une région dite privilégiée pour être assuré de produire un vin de qualité, pas plus qu’un « grand » cépage ne donne systématiquement un grand vin. Car dans chaque grappe de raisin, il y a tout ce qu’il faut pour produire le meilleur, mais également tout ce qu’il faut pour produire le plus mauvais des vins.
C’est l’adéquation de nombreux facteurs qui permet de se hisser au sommet de la pyramide de la qualité. On pourrait citer : le cépage, le terroir (le sol et le sous-sol), le climat, les conditions météorologiques de l’année, etc. Il ne faudrait pas oublier les connaissances accumulées patiemment par des générations de vignerons et de vinificateurs. En définitive, ce sont eux qui font toute la différence.
Les apports scientifiques considérables depuis un demi-siècle permettent de comprendre rapidement ce que les anciens observaient.
L’objet de cet exposé se rapportera plus particulièrement aux qualités des vins effervescents, reliées au travail du vinificateur. Nous allons voir qu’avec le même raisin, on peut, effectivement, faire le pire et aussi le meilleur. Ce qui est vrai pour les vins tranquilles devient particulièrement flagrant pour les vins effervescents. Il est clair que trois périodes de la vie des vins effervescents sont prépondérantes pour leurs qualités.
•
La vendange, et principalement les phases préfermentaires, car c’est à cette période que l’on établit la composition du vin.
•
Les assemblages : c’est à ce stade que l’on sélectionne et que l’on fixe les qualités et les équilibres obtenus à la vendange.
•
Le dégorgement-dosage : à ce moment, le vin doit être prêt depuis longtemps. Il est trop tard pour le « faire » ou pour opérer un remaniement important. Seules, quelques touches personnalisées peuvent être apportées. Mais, le dégorgement et le dosage constituent un choc important pour le vin, et c’est pour cette raison qu’il faut le préparer très soigneusement.
Au cours de cet exposé, nous allons voir en détail, les éléments qui font les qualités des vins effervescents, et comment on les obtient dès les phases préfermentaires. Dans un prochain exposé, nous parlerons des deux phases suivantes : les assemblages et le dosage.
L’objet de cet exposé ne sera pas de reprendre les techniques de base du pressurage. On supposera que tout le monde les connaît, tellement est grand le nombre de publications et d’exposés qui ont été consacrés à ce sujet. De plus, il y a une prise de conscience très importante, dans toutes les vinifications, au sujet de l’importance du pressurage dans la qualité des vins.
Il sera plus intéressant d’expliquer tous les avantages que l’on peut attendre d’un pressurage conduit en fonction du but à atteindre, c’est-à-dire du vin que l’on veut élaborer (dans le cas présent, il s’agira du pressurage de type champenois). Bien que cette vérité paraisse évidente, l’expérience prouve que ce n’est pas aussi simple qu’il le paraît. La baie de raisin est un organe vivant extrêmement complexe comme nous allons le voir par la suite.
Une parfaite connaissance de sa structure permet de choisir les parties les plus adaptées à l’élaboration des vins recherchés : les vins effervescents.
Les travaux scientifiques effectués actuellement pour mieux connaître la baie de raisin et ses constituants depuis sa naissance jusqu’à sa phase ultime de surmaturité avancée sont considérables. Ils prouvent la prise de conscience actuelle de l’importance de ces connaissances. En ce qui concerne l’élaboration des vins effervescents : champagnes, crémants et autres vins élaborés suivant les principes de la méthode champenoise, nous allons voir que le pressurage en grappes entières est un modèle du genre et qu’il est le reflet de l’intelligence éclairée des anciens praticiens champenois ainsi que de leur acharnement à produire toujours la meilleure qualité.
Il ne faut pas non plus oublier de saluer la vigilance sans faille des techniciens et scientifiques de l’interprofession champenoise, et ce, depuis plusieurs décennies, sans laquelle, des dérives au cours des phases préfermentaires se seraient immanquablement produites.
Nous reverrons quelques recommandations essentielles sur le pressurage. Les méconnaître ou les négliger entraîne immédiatement une perte des qualités énoncées dans cet exposé.
Ce texte est l'intruduction d'un article de Georges HARDY (Œnologue consultant). L'article est paru dans la Revue des œnologues n°107 spécial, avril 2003.
|